Le contexte historique

Une région stratégique, berceau de la Résistance

Cérémonie au monument
du Val d’Enfer à Cerdon.
Archives départementales de l’Ain
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La partition du territoire imposée par l'armistice de 1940 procure à Lyon un statut particulier et une influence majeure dans l'organisation des mouvements de la Résistance. Dénommé R1, le secteur de la zone Sud en Rhône-Alpes est composé de 10 départements (les 8 de l'actuelle Région Rhône-Alpes, dont l'Ain, auxquels s'ajoutent la Saône-et-Loire et le Jura).

 

Première grande ville proche de la zone de démarcation, Lyon est au coeur d'un maillage ferroviaire structuré, accueille de nombreux réfugiés refusant la défaite et prêts à s'engager, et possède de nombreuses personnalités et organismes sur lesquels appuyer l'action résistante. La zone sud, et spécifiquement le département de l'Ain, possède par ailleurs l'atout de la proximité de la Suisse qui rend possible des échanges d'informations et des replis.

Jean Moulin (1899-1943)

C’est à Lyon que les trois grands mouvements de Résistance de la zone Sud se regroupent autour de Jean Moulin pour donner naissance aux M.U.R. (Mouvements Unis de Résistance).

 

« On peut considérer que le département de l’Ain a servi de « zone de contact » entre la Résistance de la région lyonnaise et Londres durant toute la période à travers l’organisation de parachutages, atterrissages et départs. Le département aura aussi un rôle de refuge pour bon nombre de réfractaires au Service du Travail Obligatoire (…).

Le bilan des opérations de la SAP (section des atterrissages et parachutages) menée dans l’Ain est pour le moins impressionnant : au total, 13 opérations entre septembre 1942 et août 1944 ont permis d’amener en France 37 agents et d’exfiltrer 67 personnes vers Londres (…). L’activité liée aux parachutages est plus dense encore, pour la seule période de janvier à août 1944, 19 parachutages permettent d’amener plus de trente tonnes d’armement et de matériels divers. »

(…) Il ne faudrait pas négliger un autre aspect des relations entre l’Ain et l’agglomération lyonnaise, plus douloureux celui-là. Il s’agit de l’organisation de la répression de la résistance : c’es en effet de Lyon que furent lancées les trois offensives qui frappèrent l’Ain au cours de l’année 1944. C’est dans les prisons de Lyon que sont détenues les personnes arrêtées dans l’Ain. Le Mémorial de l’Oppression, établi en mai 1945 par le professeur Mazel, évoque largement l’importance de la répression subie par le département de l’Ain. »

Isabelle Rivé, directrice du CHRD de Lyon

Extrait, Les relations entre milieux résistants de Lyon et de l’Ain, Catalogue L’engagement résistant dans l’Ain, Conservation départementale des musées de l’Ain, 2012.

 

Une terre propice à l'organisation des réseaux résistants

Groupe de maquisards à Chougeat
(Matafelon), avril 1943.
Coll. Musées départementaux de l’Ain.

Dans l'Ain, la morphologie montagneuse et boisée se prête bien à l'implantation de camps de réfractaires et résistants dans les secteurs du Revermont, du du Bugey et du Valromey. A l'ouest, les plaines agricoles de la Bresse et du Val de Saône sont aptes à nourrir les maquis.

 

Parachutage de containers
dans la plaine d'Echallon.
Coll. Musées départementaux de l’Ain

Elles servent aussi de zones de parachutages. Les nombreuses voies de communication traversant le département sont des vecteurs d'échanges entre les réseaux de Résistance.

 

Routes, ponts et voies ferrées sont aussi des points d'attaques stratégiques pour empêcher ou ralentir le déplacement et l'approvisonnement des troupes allemandes.

 

« Si Bourg-en-Bresse, principale ville du département, est, en bonne logique, la centre d’impulsion de la Résistance dans l’Ain, les noyaux locaux et leurs animateurs sont dépendants des initiatives prises ailleurs, surtout à Lyon, dans la période où celle-ci gagne ses galons de « capital de la Résistance » et abrite les « centrales » des grands mouvements de la zone sud, Combat, Franc-Tireur et Libération. (…)

 

Tract appelant à la Résistance,
avril 1942.
Archives départementales de l’Ain.

Jusqu’en 1942, la nébuleuse en voie de structuration que l’on commence à dénommer « Résistance » regroupe une minorité urbaine menant, sauf pour les réseaux, une activité essentiellement propagandiste. Dans l’Ain, département rural par excellence, les résistants vivent et agissent dans les villes et bourgades de Bourg-en-Bresse, Oyonnax, Bellegarde, Nantua ou Ambérieu. C’est le cours même de la guerre qui va modifier les conditions de l’engagement résistant. (…)

 

C’est dans l’encadrement et la militarisation des « maquis » que la Résistance trouve son second souffle, une assise sociale plus large, et bascule vers le monde rural qu’elle avait largement ignoré jusque-là, faute de propositions à lui faire. »

Gilles Vergnon, maître de conférence en Histoire contemporaine à l’IEP de Lyon

Extrait, L’Ain et la France, L’Ain en France 1940-1944 : microcosme et miroir grossissant, catalogue L’engagement résistant dans l’Ain, Conservation départementale des musées de l’Ain, 2012.

Carte des camps du maquis dans le Bugey et le Valromey.
Extrait, d’après Yves Martin, "La formation des maquis de l’Ain 1942-1944", 1971.